Le minage de Bitcoin consomme autant d’électricité qu’un pays comme les Pays-Bas. En 2025, il utilise environ 173 TWh par an - une quantité impressionnante. Mais ce n’est plus seulement un problème environnemental. C’est devenu une opportunité. Des fermes de minage dans le Québec, au Texas ou en Écosse ne cherchent plus seulement à extraire des bitcoins. Elles cherchent à absorber l’énergie que le réseau électrique ne sait pas stocker. Et cette énergie, c’est souvent de l’hydroélectricité, du éolien ou du solaire.
Le minage, un outil de stabilisation du réseau
La plupart des gens pensent que le minage de Bitcoin est une machine à consommer de l’électricité. Ce n’est pas faux. Mais ce n’est pas la fin de l’histoire. Dans les régions où le vent souffle fort la nuit, ou où les rivières débordent au printemps, l’électricité produite par les énergies renouvelables est souvent gaspillée. On l’appelle l’énergie « coupée » (curtailed). Les centrales éoliennes ou hydroélectriques ne peuvent pas toujours la stocker, et le réseau ne la demande pas. Alors, elle part en fumée.
Le minage de Bitcoin, lui, peut s’arrêter ou démarrer en quelques secondes. C’est parfait pour ce genre de situation. En 2022, dans le Texas, des fermes de minage ont absorbé 1,3 TWh d’énergie éolienne qui aurait été perdue. Cette énergie a généré 60 millions de dollars de revenus pour les producteurs d’éolien. Ce n’est pas une exception. C’est une stratégie. Les mineurs ne sont plus des consommateurs passifs. Ils sont des partenaires du réseau électrique.
Hydroélectricité : le pilier du minage renouvelable
En 2025, l’hydroélectricité représente 23,4 % de l’énergie utilisée pour le minage de Bitcoin. C’est la source renouvelable la plus utilisée. Pourquoi ? Parce qu’elle est stable, abondante, et souvent disponible à bas prix. Les grandes centrales hydroélectriques du Québec, de l’État de Washington ou encore de la Chine (avant 2021) sont devenues des hubs naturels pour le minage.
Les mineurs installent leurs fermes juste à côté des barrages. Pendant la saison des crues, quand l’eau coule en excès, ils augmentent leur activité. En hiver, quand le débit diminue, ils réduisent ou arrêtent. Ce n’est pas idéal pour une production constante, mais c’est rentable. Un mineur au Québec a rapporté sur Reddit qu’il payait seulement 0,035 $ le kWh grâce à son contrat avec une centrale hydroélectrique. Son profit était 65 % plus élevé que ceux qui achetaient leur électricité sur le réseau traditionnel.
Le problème ? La saisonnalité. En hiver, l’eau se fige. Les barrages se vident. Et le minage s’arrête. Ce n’est pas un défaut - c’est une caractéristique. Les mineurs qui réussissent acceptent cette fluctuation. Ils ne cherchent pas à tout contrôler. Ils s’adaptent.
Éolien : le minage au rythme du vent
Le vent ne souffle pas toujours. Mais quand il souffle fort, il produit beaucoup d’électricité. Et c’est souvent à bas prix. Au Texas, l’énergie éolienne coûte en moyenne 0,022 $ le kWh - presque deux fois moins que le gaz naturel. C’est pourquoi 15,4 % du minage mondial fonctionne avec de l’éolien.
Les fermes éoliennes de l’Ouest du Texas sont devenues des centres de minage. Des entreprises comme Riot Platforms ont installé des systèmes de réponse à la demande. Quand le réseau électrique est en tension - par exemple pendant une canicule - les mineurs réduisent automatiquement leur consommation. En août 2024, l’une de leurs fermes a réduit sa consommation de 92 % en quelques minutes. En échange, elle a reçu 150 $ par MWh du réseau. Ce n’est pas un subside. C’est un service. Le minage devient une batterie intelligente.
Mais il y a un piège. Sans stockage, les mineurs perdent 18 % de leur temps à attendre que le vent revienne. C’est pourquoi les projets les plus avancés combinent éoliennes, batteries lithium-ion et minage. Les coûts augmentent, mais la fiabilité aussi. Un mineur du Texas a déclaré qu’il avait doublé son profit en ajoutant 5 MWh de stockage à sa ferme de 25 MW.
Solaire : le minage dans les régions isolées
Le solaire ne représente que 3,2 à 4,98 % du minage mondial. C’est peu. Mais c’est là que les innovations les plus intéressantes se passent. Dans les régions reculées, loin des réseaux électriques, le solaire est la seule option. Et c’est précisément là que le minage devient un outil de développement.
En mai 2025, une entreprise nommée Gridless Compute a installé une ferme solaire de 50 à 100 kW au Kenya. Elle alimente 120 machines de minage. Mais elle ne s’arrête pas là. Les surplus d’énergie sont redirigés vers 500 foyers locaux. Résultat ? Les habitants paient 40 % moins cher pour leur électricité. Le minage ne sert plus seulement à produire des bitcoins. Il sert à produire de l’électricité pour les gens.
Le coût d’installation ? Environ 1,2 million de dollars pour 1 MW. C’est cher. Mais dans des zones sans accès à l’électricité, c’est la seule façon d’apporter de la puissance. Les panneaux solaires, les batteries et les rigs de minage sont installés ensemble. C’est un système intégré. Pas une simple usine. Une infrastructure.
Les défis : géographie, coûts et incertitude
Le minage renouvelable n’est pas une solution magique. Il a ses limites.
La première, c’est la géographie. Vous ne pouvez pas installer une ferme de minage au milieu du désert sans soleil, ni en pleine forêt sans vent. Les meilleures zones sont celles où l’énergie renouvelable est abondante - le Texas, le Québec, la Suède, la Géorgie, la Norvège. Mais cela crée des risques de concentration. Si un seul pays ou une seule région domine, le réseau devient vulnérable.
Le deuxième défi, c’est le capital. Installer une ferme solaire ou éolienne avec des rigs de minage coûte des millions. Les petits mineurs ne peuvent pas le faire seuls. C’est pourquoi 78 % des grandes fermes utilisent des contrats d’achat d’énergie (PPA) avec des producteurs renouvelables. Ces contrats durent en moyenne 7,3 ans. Ils garantissent un prix bas. Mais ils engagent à long terme.
Le troisième défi, c’est l’incertitude. Le vent ne souffle pas toujours. Le soleil ne brille pas toute la journée. Les rivières se tarissent. Les mineurs doivent donc avoir des systèmes intelligents pour ajuster leur activité en temps réel. Ce n’est pas un travail de technicien. C’est un travail d’ingénieur en réseau électrique.
Le futur : vers 75 % d’énergie renouvelable
En 2020, seulement 36,8 % du minage de Bitcoin utilisait des énergies renouvelables. En 2025, c’est 52,4 %. Et les projections indiquent que ce chiffre pourrait atteindre 68 à 75 % d’ici 2027. Pourquoi ? Parce que les pays qui dépendent encore du charbon - comme le Kazakhstan - commencent à imposer des taxes carbone. Les mineurs doivent se déplacer. Et ils se déplacent vers l’énergie propre.
Les innovations arrivent vite. En 2025, un consortium de 37 entreprises a lancé le Solar Mining Consortium. Elles opèrent ensemble 1,2 GW de puissance solaire dédiée au minage. Leur rendement énergétique est de 48 % - presque deux fois plus que les fermes solaires classiques. Pourquoi ? Parce qu’elles n’ont pas de perte. L’énergie est utilisée en temps réel. Pas stockée. Pas gaspillée.
Et les géants de la finance s’y mettent. En mai 2025, BlackRock a annoncé un fonds de 500 millions de dollars pour financer des infrastructures de minage à énergie renouvelable. Ce n’est pas un investissement dans Bitcoin. C’est un investissement dans l’énergie propre.
Conclusion : une révolution silencieuse
Le minage de Bitcoin n’est pas un ennemi de l’environnement. Il est devenu un catalyseur. Il transforme l’énergie gaspillée en valeur numérique. Il permet aux producteurs d’éolien et de solaire de survivre. Il apporte de l’électricité dans les zones isolées. Il aide les réseaux à rester stables.
Les critiques disent que 98 millions de tonnes de CO2 sont encore produites chaque année. C’est vrai. Mais ce chiffre baisse. Rapidement. Et il baisse parce que le minage s’adapte. Il ne cherche plus à consommer. Il cherche à optimiser.
Le futur du minage n’est pas dans les centrales à charbon. Il est dans les barrages, les éoliennes et les panneaux solaires. Il est dans les régions froides, venteuses et ensoleillées. Il est dans les mains des ingénieurs qui apprennent à parler le langage du réseau électrique.
Le Bitcoin ne va pas sauver la planète. Mais il aide à faire de l’énergie renouvelable une ressource vivante. Et c’est déjà beaucoup.
Le minage de Bitcoin consomme-t-il plus d’énergie que les pays européens ?
Oui, mais pas comme on le pense. Le minage de Bitcoin consomme environ 173 TWh par an, ce qui équivaut à la consommation annuelle de la Suisse ou des Pays-Bas. Mais contrairement à ces pays, où l’électricité sert à éclairer les maisons, chauffer les bâtiments ou alimenter les usines, le minage ne sert qu’à un seul objectif : valider des transactions blockchain. Et depuis 2021, plus de la moitié de cette énergie vient de sources renouvelables - une proportion bien supérieure à celle du réseau électrique européen moyen, qui est d’environ 30 %.
Pourquoi les mineurs choisissent-ils le Québec et le Texas ?
Le Québec offre une énergie hydroélectrique abondante et peu chère, surtout en période de crue printanière. Le Texas, lui, a un réseau électrique décentralisé (ERCOT) et une production éolienne massive. Les mineurs y trouvent des contrats d’achat d’énergie à prix fixe, des incitations fiscales, et des conditions climatiques favorables pour refroidir leurs machines. Ces deux régions ont aussi des infrastructures électriques capables de supporter des charges de 10 à 100 MW - ce qui est rare ailleurs.
Le minage solaire est-il rentable sans subventions ?
Oui, mais seulement dans des contextes spécifiques. Dans les régions où l’électricité du réseau est chère ou inexistante - comme en Afrique de l’Est ou en Amérique centrale - le minage solaire avec stockage devient la solution la moins coûteuse à long terme. Le coût initial est élevé (1,2 million $ pour 1 MW), mais les économies sur la facture d’électricité et les revenus générés par la vente de surplus rendent le projet viable en 3 à 5 ans. En Europe ou aux États-Unis, où l’électricité est bon marché, le solaire est moins compétitif que l’hydro ou l’éolien.
Les batteries sont-elles indispensables pour le minage éolien ?
Pas indispensables, mais fortement recommandées. Sans batterie, un mineur éolien peut perdre jusqu’à 18 % de son temps d’activité à cause des calmes. Avec une batterie de 5 à 10 MWh, il peut lisser sa production, maintenir une activité stable et vendre de l’énergie au réseau pendant les pics de demande. Le coût d’ajout d’une batterie représente environ 30 % du budget total, mais augmente le profit de 25 à 40 % sur 5 ans.
Le minage renouvelable réduit-il vraiment les émissions de CO2 ?
Oui, et de manière significative. En 2025, le minage de Bitcoin émet environ 39 millions de tonnes de CO2 par an - l’équivalent d’un petit pays. Mais sans l’adoption des énergies renouvelables, ce chiffre serait de 70 à 80 millions. La transition vers l’hydro, l’éolien et le solaire a réduit les émissions de plus de 40 % en cinq ans. Ce n’est pas parfait, mais c’est la plus rapide réduction de l’empreinte carbone dans un secteur industriel de cette taille.

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